[Parcours urbain] Les bains Pommers

©Stephane JORDAN- Mairie d'Avignon

En flânant rue Philonarde, le promeneur sera intrigué par l’inscription « Bains Pommer » placée sur la façade d’un bâtiment. Il s’agit des Bains Publics créés dans la Ville d’Avignon à la fin du XIXe siècle, établissement qui a fermé ses portes en 1972. Ce lieu est unique en France car il est resté en l’état depuis sa fermeture. Tous les autres établissements de ce style ont disparu ou ont été transformés. La visite de ce site permet un formidable voyage dans le Temps et la découverte d’un certain style de vie.

Auguste-Claude Pommer

La grande aventure des Bains Pommer commence avec Auguste-Claude Pommer. A la fin du XIXe siècle, il est alors maitre-baigneur aux Bains de la Poste situés rue de la République. Il est chaudronnier de formation et ancien compagnon. En 1886, il se porte acquéreur d’un grand bâtiment constitué de trois ailes entourant un jardin. Un des intérêts de cette parcelle est qu’elle située sur le cours d’eau d’une sorguette.

En 1888, il charge l’entrepreneur Daruty de lui dresser les plans d’un établissement de bains. De par sa formation initiale, Auguste-Claude Pommer se chargera lui-même de la mise en place des installations de l’édifice. Tous les équipements seront de qualité, les baignoires en zinc, des petites dalles de terre cuite pour les sols, de la pierre de Fontvieille pour les murs, des rampes en fonte, du noyer et de carreaux en verre pour les cabines, des miroirs.

Les Bains Pommer se situent, à l’époque, dans un quartier en pleine mutation. Le percement de la grande rue Thiers vient d’être réalisé et donne une ambiance de vie très « parisienne ».

Les Grands Bains de la place Pie

C’est lors de la fête de l’Immaculée Conception, qui marque le début de la Foire de l’Hiver, le 8 décembre 1890, que l’inauguration des Bains Pommer a lieu. Les publicités de l’époque font référence aux « Grands Bains de la Place Pie ».

Les installations des bains sont à la pointe de la modernité de l’époque et 40 cabines individuelles, équipées de baignoires, sont proposées.

Une des grandes finalités de ce genre d’établissement est de proposer des prestations thérapeutiques à base d’eau sulfureuse, sous forme de bains ou de douches au jet. L’Hydrothérapie est en plein essor et est sensée guérir aussi bien le physique que le psychologique. Les espaces réservés pour ces soins sont localisés dans ce qui est appelé l’ « allée des sulfureux ».

Un puits artésien permet l’approvisionnement en eau, qui est chauffée par trois chaudières à charbon placées dans le local technique où sont réalisés le pompage et le stockage dans des réservoirs.

La salle principale est majestueuse et éclairée par une grande verrière équipée d’un velum. Les cabines sont distribuées tout autour. Un escalier permet d’accéder à l’étage où d’autres cabines sont disponibles. La montée est agrémentée d’une décoration constituée de trois grands vases en majolique. Nous sommes vraiment dans un style Belle Epoque.

Les clients à l’intérieur des bains attendaient leur tour, tout en discutant assis sur le grand pouf central agrémenté d’aspidistras en pots.

Un personnel important est aux petits soins des clients, s’occupant de remplir les baignoires, de fournir brosses, serviettes chaudes, savon et autres produits cosmétiques. Une clochette placée à l’entrée des cabines permet au personnel de répondre immédiatement à l’appel des clients.

Le temps d’occupation des cabines est limité à 40 mn et est rappelé par une inscription placée dans chacune d’entre elles.

La propreté de l’établissement était impeccable. Après chaque passage, la baignoire était récurée à l’aide de cendre de bois tamisée, récoltée chez les boulangers de la ville.

Ce lieu a connu un réel succès car l’hygiène à cette époque est primordiale et un grand nombre d’habitations appartenant aux familles bourgeoises de la ville ne possèdent pas encore de salles de bain ni d’eau courante.

Certaines figures célèbres avaient leurs habitudes, tel Frédéric Mistral qui prenait toujours la cabine N° 14.

Dans les années 30, le fils d’Auguste-Claude, Louis Pommer, effectue quelques transformations. Il crée des cabines de douches dans des couloirs annexes, couvre les murs des cabines de carreaux de céramique et remplace les baignoires en zinc par des baignoires en porcelaine. Les chaudières à charbon seront également remplacées par des chaudières à mazout.

En 1955, de nouveaux travaux vont être réalisés afin de proposer une dizaine de douches moins luxueuses et au tarif plus bas. Les soins à base d’eau sulfureuse seront supprimés et ces espaces dédiés remplacés par des douches.

Une nouvelle clientèle fera son apparition constituée d’ouvriers et d‘élèves. Ces bains deviendront alors plus populaires.

Elisabeth Pommer, l’arrière-petite-fille d’Auguste-Claude Pommer, connaitra les derniers temps des bains. La modernisation de la société et l’équipement des maisons en salles de bains va entrainer la désaffection de ces établissements par la population. Les Bains Pommer fermeront leurs portes en 1972. Au niveau du comptoir, les prix de l’époque sont toujours affichés : 3,20 francs pour un bain, 2,20 francs pour une douche. Les articles d’hygiènes  y sont toujours disponibles ainsi que dans les vitrines, lames de rasoirs, lotions, savons…

En 1992, les Bains Pommer ont été classés au titre des Monuments Historiques. La Ville d’Avignon a acquis cet établissement en 2017.

Bains Pommer

Les bains sont aujourd'hui fermés au public. Il est possible des les visiter à certaines occasions comme les journées européennes du patrimoine.

Ils appartiennent à la ville d'Avignon qui a pour projet de valoriser ces bains grâce à un musée.

http://www.avignon.fr/avignon-se-reinvente/grands-projets/bains-pommer/